Comment bien commencer une partie d’échecs

Parfait, vous connaissez les règles du jeu, les mats élémentaires et les combinaisons de base. Vous êtes prêts pour votre première partie. Vous posez un échiquier sur la table, placez les pièces et vous voilà assis face à votre fils de 7 ans. Il vous a donné les Blancs, pour vous laisser une chance. Et là… qu’est-ce que vous allez bien pouvoir jouer ?

Jouer sa première partie d’échecs, c’est comme avoir appris le code de la route et se retrouver au volant d’une voiture. Par où commencer ? Vous n’allez pas y arriver tout seul. Mais rassurez-vous, je suis votre moniteur et vous allez avoir votre première leçon de conduite d’une partie. Alors attachez votre ceinture, et allons-y !

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Que font la plupart des débutants ?

Dans la position initiale ci-dessus, beaucoup de joueurs à qui on n’a jamais appris comment commencer une partie vont jouer soit 1.a4 (parce que c’est la première pièce qu’on peut bouger dans l’ordre croissant des colonnes) soit 1.h4, parce que c’est le pion le plus proche de la main droite.

Les plus timides vont jouer 1.a3 ou 1.h3 avant de pousser leur pion d’une deuxième case au deuxième coup.

Ces coups sont en réalité joués au hasard, sans but précis.

Pour bien commencer une partie, nous allons voir que les coups doivent être joués avec un ou plusieurs buts bien précis.

Qu’est-ce qu’une ouverture aux échecs ?

Mais commençons par une définition: aux échecs, on appelle ouverture les premiers coups de la partie. L’ouverture est suivie du milieu de partie (ou milieu de jeu) puis de la finale.

Vous trouvez ces définitions un peu trop vagues ?

Il n’y a effectivement pas de critère précis qui permet de dire qu’on passe de l’ouverture au milieu de jeu. Mais la bonne nouvelle est que cela n’a aucune importance. L’important, c’est d’arriver dans les premiers coups de la partie à faire les 4 choses suivantes:

  • occuper ou contrôler le centre de l’échiquier
  • faire jouer ses pièces
  • mettre son Roi en sécurité
  • créer un déséquilibre

Voyons ces quatre points en détail.

Occuper ou contrôler le centre de l’échiquier

Le centre de l’échiquier est formé par les 4 cases d4, e4, d5, e5. L’idéal est d’arriver à occuper le centre avec vos pions, comme dans le diagramme suivant (ce diagramme est bien sûr une illustration: dans la réalité les Noirs jouent aussi 😉 ):

Deux pions au centre, comme dans le diagramme, contrôlent 4 cases, ce qui va limiter les possibilités de votre adversaire: impossible pour lui de placer une pièce sur l’une de ces 4 cases !

Dans certains cas, il n’est pas nécessaire ou pas possible d’occuper le centre avec ses pions, mais il faut alors essayer au minimum de le contrôler, c’est-à-dire d’empêcher votre adversaire de l’occuper avec ses pions comme dans le diagramme ci-dessus. Voici une façon de contrôler le centre:

Dans cet exemple, la case d5 est contrôlée par le pion en c4, le Cavalier en c3 et le Fou en g2: les Noirs vont avoir du mal à occuper cette case.

Faire jouer ses pièces

Imaginez que vous soyez un général commandant une armée, et que vous partiez pour la bataille. Allez-vous envoyez uniquement quelques soldats en éclaireurs ?  Allez-vous laisser le reste de vos troupes à la maison ? Probablement pas.

Vous allez vouloir utiliser toute votre armée pour gagner la bataille !

Aux échecs, c’est pareil: vous allez devoir faire jouer toutes vos pièces si vous voulez gagner la partie. On appelle cela aussi développer ses pièces.

Mais alors, comment faire jouer ses pièces ? Faire jouer ses pièces, ça veut dire leur donner un maximum d’activité. Revenons un instant à la position initiale (le premier diagramme en haut de cet article). Dans cette position, seuls les Cavaliers peuvent bouger, chacun sur deux cases. Selon  le conseil précédent, occuper ou contrôler le centre, on voit déjà que les coups de Cavalier Cf3 (qui contrôle e5) ou Cc3 (qui contrôle d5) sont des coups qui donneront de l’activité aux Cavaliers des Blancs (de même Cf6 ou Cc6 pour les Noirs).

Les Fous ne peuvent être développés qu’après avoir déplacé des pions. Ils doivent être placés de façon à attaquer ou contrôler des cases sur les diagonales importantes. Par exemple, le Fou en f1 va souvent en d3 (d’où il peut attaquer la case h7), en c4 (d’où il peut contrôler la case d5 et attaquer la case f7) ou en b5 (d’où il peut parfois mettre le Roi noir en échec), comme illustré dans le diagramme suivant:

Une autre façon de donner de l’activité aux Fous est d’avancer le pion b ou g d’une case et de placer le Fou sur la case libérée, en b2 ou g2 (ou b7 et g7 pour les Noirs). On appelle une telle disposition un Fianchetto (un mot italien qu’il faut prononcer fianquetto).

Le diagramme ci-dessous montre un exemple de Fou blanc en fianchetto. De la case b2, le Fou contrôle toute la diagonale a1-h8, en particulier les cases du centre d4 et e5 et la case g7 sur le petit roque noir.

Les Tours attendent en général le développement des autres pièces pour se placer sur une colonne où elles trouveront plus d’activité: aider à avancer un pion, attaquer un pion ennemi ou essayer de pénétrer dans le camp adverse. Le diagramme suivant montre un exemple de développement d’une Tour:

En d1, la Tour est plus active qu’en a1: elle protège le pion d4 et peut l’aider à avancer.

Quant à la Dame, il faut éviter de la bouger trop vite et faire attention à ne pas l’exposer: elle a une grande valeur !

Un dernier conseil: veillez à faire jouer toutes vos pièces avant de vous lancer dans un plan compliqué ou une attaque sur le Roi adverse. Il ne faudrait jamais bouger la même pièce deux fois avant d’avoir bougé toutes ses pièces une fois !

Mettre son Roi en sécurité

Quelle est la pièce la plus importante aux échecs ? Le Roi bien sûr, puisque sa perte signifie la perte de la partie.

C’est pourquoi dans l’ouverture comme dans toute la partie, il est essentiel de veiller à la sécurité de son Roi.

Le plus souvent, mettre le Roi en sécurité signifie faire le petit roque. A partir de la position de départ, les Blancs peuvent faire le petit roque en jouant e4, Cf3, Fc4 et enfin O-O:

Dans la réalité, les Noirs jouent aussi, et chaque camp doit s’adapter en fonction des coups de son adversaire 🙂

Parfois, l’un des deux joueurs peut estimer que son Roi sera plus à l’abri sur l’aile dame et faire le grand roque. Il arrive même qu’un joueur estime que son Roi est plus en sécurité au centre de l’échiquier,  et décidera de ne pas roquer de tout. Faites cela si vous voulez, mais en sachant ce que vous faites et à vos risques et périls !

Créer un déséquilibre

Je finirai cette liste de conseils pour l’ouverture par un dernier point, qui est souvent oublié: dans l’ouverture, le joueur le plus fort va souvent essayer de créer un déséquilibre, c’est-à-dire une position dissymétrique, afin de compliquer la partie. Au départ, en effet, la position est symétrique, et les Blancs n’ont qu’un tout petit avantage grâce au droit de commencer la partie.

Ce petit avantage de départ est en principe insuffisant pour gagner si aucun des deux joueurs ne fait de grosse erreur. C’est pourquoi l’un des deux joueurs essaiera de ne pas copier son adversaire afin de créer des chances de gain.

Par exemple, après 1.e4 les Noirs ne sont pas obligés de jouer 1…e5 (même si c’est tout à fait bon). Ils essaieront souvent des coups différents comme 1…c5 ou 1…e6. N’hésitez pas à essayer des ouvertures dissymétriques pour corser vos parties, mais toujours en respectant les trois règles: occuper ou contrôler le centre, faire jouer toutes ses pièces, mettre son Roi en sécurité.

Ouverture espagnole, défense française, gambit dame…. keseksa ?

Si vous jouez dan un tournoi ou dans un club, ou si vous regardez des vidéos d’échecs, vous entendrez souvent ces noms bizarres. Il existe en effet de nombreuses façons de commencer une partie (1.e4, 1.d4, 1.c4… par exemple), et les Noirs disposent de toutes une panoplie de réponses. Vous en découvrirez un certain nombre dans notre article sur les principales ouvertures aux échecs.

Ces différentes façons de commencer une partie ont reçu au cours du temps des noms pour les distinguer. Ne vous en inquiétez pas trop. Connaitre les noms des ouvertures ne vous aidera pas à mieux jouer: essayez plutôt de respecter les conseils donnés dans cet article !

En résumé

Retenez et suivez les conseils ci-dessus pour bien commencer une partie d’échecs. Ne pas les suivre vous expose à bien des déboires, comme ce qui est arrivé aux Blancs dans cet exemple.

Bonnes parties !

Photo d’illustration: Adam Raouf